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Opération patience

Bio-Bio, Chili, février 2008


« Par la raison ou par la force » devise du Chili


Au Chili, chaque année, l'exploitation forestière augmente de 50 000 hectares. En plus de se voir littéralement noyés par la monoculture de pin et d'eucalyptus, les sols commencent à manquer d'eau, la flore et la faune se modifient, et la forêt primaire disparaît rapidement. Un rapport de la Banque centrale assure que dans 25 ans elle aura complètement disparu. Le territoire ancestral des Mapuches, situé sur l'actuelle région du Bio-Bio, riche en terres et en minerais, est une véritable manne pour les multinationales.
Face à la menace inéluctable de l'appauvrissement des sols et l'expropriation forcée, les Mapuches continuent de lutter pour l'autonomie de leur territoire, et la création d'un parlement indépendant qui respecterait la volonté de leur peuple. Le gouvernement restant sourd à leurs revendications, la lutte de l'organisation la plus radicale, la CAM (Coordinadora Aranco Malleco) passe désormais par l'action directe.  L'état, appuyé par les médias qui diabolisent leur cause, réplique à l'opposition par une lourde surveillance policière, des arrestations massives, l'emprisonnement des chefs de la résistance, et une répression constante du peuple mapuche, qui vient bien souvent grossir les rangs des travailleurs sous-payés des villes.

Cette série rassemble quelques images prises dans la région du lac Lleu-Lleu et témoigne de la vie rudimentaire d'une communauté autonome entourée par les entreprises forestières. A part  Yvan Llanquileo,  un des dirigeants de la CAM  et chef de la communauté - qui était à cette époque recherché par la police- la peur des représailles incite les personnes rencontrées à témoigner à visage couvert et sous un autre nom. En face des rives touristiques et fréquentées du Lleu-Lleu, Rukañanko, sur les terres récupérées, est sous la surveillance permanente des forces de l'ordre, qui contrôlent la plupart des points d'accès au village. A travers ces quelques images, j'ai voulu montrer le fossé qui sépare les multinationales aux profits considérables et les habitants d'une des régions les plus pauvres du Chili, engagés dans une lutte démesurée.

Cette série se nomme Opération Patience, car ce terme définit officiellement l'action lourde du gouvernement à l'encontre des organisations politiques mapuches avec des moyens surdimensionnés. A leur manière, ils prennent le contre-pied de cette oppression qui dure dans le temps. Pour eux l'opération patience représente l'espoir qu'un jour la terre reviendra à leur peuple.

Deux fillettes jouent sur les bords du lac Lleu Lleu vers Ranquilhue, l’une des plus anciennes communautés mapuche du lac, à quelques kilometres des plages du Pacifique. La beauté exceptionnelle de la région et  la présence d’un minerai rare utilisé dans l’aéronautique (le scandium) provoquent de nombreuses convoitises. La construction d’un complexe touristique et l’exploitation minière menacent la vie culturelle et économique des communautés mapuche. La plantation de pins de l’entreprise forestière Mininco a ainsi déjà largement entamé la biodiversité du lac et obligé de nombreuses familles à migrer vers d’autres terres.

Des employés de la « celulosa d’Arauco » enlèvent l’écorce d’eucalyptus fraîchement coupés sous l’œil des contremaîtres. En mai 2007, suite à une émeute, un employé de cette compagnie, Rodrigo Cisterna, a été abattu par la police lors d’une grève massive des salariés de la « forestale » pour l’amélioration de leurs salaires et conditions de travail.

Terre défrichée après une coupe de bois. Près de 80% des terres cultivables ont ainsi été recouvertes par la monoculture qui empêche les populations locales de cultiver leurs champs, et le sol des rares terres mitoyennes non plantées de pins et d’eucalyptus est totalement acide et non-cultivable. Cette destruction progressive des forêts natives a son cortège de conséquences sur la biodiversité. Ainsi, de nombreuses espèces animales et végétales ont déjà disparu.

“Bienvenu à la maison de la resístanse” (castellano). Sur le mur: “Dix fois nous vaincrons” (en chedungun ou mapudungun, langue mapuche)

maison du longko et de sa famille sur les rives du lac lleu-Lleu

Maison du longko, Rukañanko

Yvan, el lonko avec sa famille à Rukañanko, Araucanie, Chili

coupe illégale du bois d'eucalyptus sur un terrain de l'entreprise forestière par les mapuches, vers le lac Lleu-Lleu

sieste après la coupe d'arbres, Rukañanko, Araucanie, Chili

Départ en barque des participants au nguillatun de l’île du lac Lleu Lleu. Un nguillatun est une cérémonie religieuse essentielle de la vie culturelle mapuche. Bien souvent c est l’occasion de profiter de la réunion de la communauté pour débattre d’un thème qui la concerne. Historiquement cette île fut le lieu ou se rencontraient les communautés des environs du lac pour organiser le weichan (la guerre) :Elle était il y a encore années aux mains d’un propriétaire individuel avant d’être récupérée par la CAM et les communautés du lac.

Le longko Yvan Llanquileo jouant de la trutruca, instrument traditionel mapuche, pendant que sa familla tente d’attrapper un coq. Lac Lleu Lleu, Rukañanco.

Sebastian, le père du Lonko qui a presque cent ans d'âge, Rukañanko

Un pochoir utilisé pour sérigrafier des t-shirt à l’éffigie de Alex Lemun, jeune mapuche abattu par la police en 2002 dans une commune de Ercilla lors d’une opération de récupération de terre. Le policier dont la balle a atteint Alex à la tête a peu après été gradé ainsi que le chef de la police de la région.

el lonko, un des chefs de la rébellion mapuche et recherché par la police profite d'une averse pour se reposer un instant chez lui, Rukañanko, Chili

La famille du longko regarde le seul instrument électronique de la maison qui est aussi leur unique moyen de communiquer avec l’exterieur (la communauté est relié à la ville la plus proche par un seul bus 3 fois par semaine). Rukañanko

frontière entre un terrain privé et les terres surexploitées par les entreprises forestières, lac Lleu-Lleu

Les frères Larroulet dans leur bureau à Cañete. Ils appartiennent à une des plus riches familles de colons de la région. La richesse de ces familles provient de l’usurpation des terres du Wallmapu à l’aide d’arnaques, des faux-papiers ou simplement d’expropriations manu militari. Après avoir obtenu ces terres gràce à la bienveillance officielle, c’est aujourd’hui l’État lui-même qui les rachète à prix d’or aux riches propriétaires pour les redistribuer à des familles mapuche . Celles-ci doivent ainsi souvent s’installer loin de leur communauté d’origine.

Ce militant de la Coordinadora Arauco Malleco (CAM) a été condamné a 3 ans de prison pour avoir incendié les camions d’une entreprise forestière. En détention, les prisonniers mapuche sont encore souvent enfermés avec les détenus de délits communs parce que la justice chilienne ne reconnait pas leur statut de prisonnier politique . Le gouvernement chilien a déclaré par ailleurs la CAM “association illicite”. Cet homme n’a pas bénéficié de la remise de peine qui lui était due car il ne s’est jamais officiellement repenti de ses actes face à la justice.

Rayena, la petite amie de Matias, l'un des jeunes assassiné par la police lors d'une opération de récupération des terres en janvier 2008

Stockage massif de bois dans une entreprise forestière de Colcura. Au sud de Concepcion. En attendant d’être transformés en pâte à papier, les troncs sont arrosés d’eau 24heures sur 24 pour éviter la formation de champignons.

A. l’une des porte-parole de la CAM, coordinadora Arauco-Malleco. Elle prépare chez elle du mote, plat traditionnel mapuche à base de blé pour le nguillatun. A. vit seule avec son fils de deux ans qui est né en clandestinité alors qu’elle fuyait la répression avec son conjoint. Celui-ci purge une peine de 5 ans pour avoir incendié un camion forestier mais surtout pour faire partie de la CAM et s’être opposé farouchement à l’ouverture de la mine de scandium.

Un jeune mapuche s'entraîne à lancer des pierres au witruwe (fronde mapuche), seule arme des mapuches face aux agressions policières.

Laufken, la fille du Longko courant sur la colline à  Rukañanko.

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